Quatre ans après la réforme de 2018, qui a enclenché un formidable essor de l’apprentissage, l’heure est à la sobriété budgétaire : les crédits alloués aux organismes de formation vont être réduits.
Si l’apprentissage a connu un développement record avec la loi de septembre 2018 «pour la liberté de choisir son avenir professionnel» et les aides du plan de relance, la réforme a aussi eu pour contrepartie les déficits répétés de France compétences, l’instance de régulation et de financement de la formation professionnelle, pilotée par l’Etat.
Mais le gouvernement a finalement décidé de prendre le taureau par les cornes. Selon nos confrères des Echos, il s’agit de la fin du «quoi qu’il en coûte» pour l’apprentissage. Confirmation ce jeudi : une délibération adoptée par le conseil d’administration de France compétences prévoit une baisse de 10% des dotations aux organismes de formation, annonce Le Monde.
La baisse des crédits alloués aux organismes de formation se fera toutefois en deux étapes : de 5% à compter du 1er septembre, puis d’un montant qui devrait être équivalent à partir du 1er avril 2023. «Entre 750 et 800 millions d’euros d’économies sont attendues de ces arbitrages, qui ont été pris en concertation étroite avec l’Etat – à sa demande même, aux dires de plusieurs protagonistes», précisent nos confrères. Cette année, le déficit de France compétences pourrait grimper à 5,9 milliards d’euros, après avoir reçu, en 2021, une subvention exceptionnelle de 2,75 milliards, selon la Cour des comptes.
« Une fausse bonne piste »
Dans un rapport qui n’est pas passé inaperçu, les magistrats de la rue Cambon ont mis la pression sur le gouvernement, en pointant le financement de la loi de 2018. «Le développement des effectifs d’apprentis, objectif affiché de la réforme, n’a pas été anticipé, pas plus que la croissance du coût unitaire par apprenti», a relevé la Cour, estimant, en outre, que les niveaux de financement des contrats «seraient surévalués d’environ 20% par rapport au coût estimé des formations».
La décision du conseil d’administration de France compétences n’était donc pas une surprise. Dès le début de la semaine, les organisations professionnelles sont montées au créneau. L’Union des entreprises de proximité (U2P) a dénoncé «une fausse bonne piste», estimant que la révision à la baisse des crédits accordés aux centres de formation «remettrait en cause le rôle accordé aux branches professionnelles et risquerait d’assécher rapidement en compétences de nombreuses professions qui souffrent déjà de pénuries de main d’œuvre», dont la coiffure.
De son côté, les Chambres de métiers et de l’artisanat a appelé le gouvernement à ne pas agir «dans une logique purement comptable». «Il serait dangereux d’appliquer une mesure de baisse uniforme sans regarder les performances des formations, titres et diplômes impactés», a mis en garde CMA France dans un communiqué.