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Maud Ravier : « La demopigmentation rehausse le statut de l’esthéticienne »

MAUD RAVIER

Elle était leader sur le segment de la dermopigmentation. La pandémie est passée par là, en la faisant repasser par la case départ. En exclusivité pour Profession bien-être, Maud Ravier livre ses réflexions sur le marché de l’esthétique.

Profession bien-être : L’arrêt de vos activités a stupéfié le monde professionnel de l’esthétique. Vous étiez pourtant sur une trajectoire brillante, et vous faisiez rêver beaucoup d’esthéticiennes. Que s’est-il passé ?

Maud Ravier : En premier lieu, la pandémie. Après de gros investissements, nous avons ouvert le lieu qui devait regrouper toutes nos activités, de l’institut à la formation, en passant par la distribution des pigments et des accessoires trois semaines avant le premier confinement.

Pendant les mois de confinement, nous avons dû assumer des doubles loyers sans aucune rentrée. Nos propriétaires qataris avaient refusé de nous laisser étaler les paiements. Et comme tous les travaux n’étaient pas terminés – nous n’avions ouvert qu’une partie des locaux -, à la sortie des confinement, la plupart de nos entrepreneurs et corps de métiers avaient mis la clé sous la porte. Donc, là aussi, double paiement, double peine.

Un revers de taille pour quelqu’un qui avait donné ses lettres de noblesse à la dermopigmentation…

Oui, vraiment. On peut d’ailleurs se poser la question : pourquoi la France traite-t-elle aussi mal ses entrepreneurs ? Pendant quinze ans, j’ai créé des emplois, j’ai payé toutes les charges, et Dieu sait s’il y en a ! Aujourd’hui, mes employés sont au chômage ou se sont recasées. Le chef d’entreprise, non. Et je ne parle pas simplement pour moi. J’ai de la chance, de la notoriété, et je peux rebondir. Et croyez-moi, je vais le faire !

Entreprendre est difficile en France, selon vous ?

Oui, et je pense à toutes ces esthéticiennes qui ont pris le risque de l’entreprenariat et qui, après avoir travaillé 60 heures par semaine pour un salaire dérisoire – quand elles peuvent se payer – se retrouvent submergées par la crise. J’ai plusieurs cas autour de moi : une esthéticienne qui gérait trois instituts et qui a dû en fermer deux pour arriver à survivre, une autre qui se retrouve seule avec deux enfants, sans source de revenus, une autre encore qui a pris le parti de travailler à domicile…

On oublie trop souvent qu’une esthéticienne, aussi petit que soit son institut, est un entrepreneur et qu’en tant que telle, elle crée de la valeur. Ses charges viennent alimenter la machine étatique. Pour autant, elle ne s’enrichit pas : c’est déjà beau si elle arrive à se payer l’équivalent d’un Smic !

Et je ne parle pas de la condition des free lance ! En dehors de mes 37 salariés, je faisais appel à beaucoup de formatrices free lance, pour la plupart des anciennes élèves. Ce sont celles qui me poussent le plus à reprendre une activité de formation. Elles  ne disposent pas de «parachute» pour envisager de passer sereinement à l’étape d’après !

Mais vous restez néanmoins confiante dans l’avenir de la dermopigmentation ?

Absolument. C’est la prestation qui rehausse le statut de l’esthéticienne. Je sais de quoi je parle. J’ai eu un premier institut où je proposais toutes les prestations classiques, de l’épilation aux ongles. Et j’avais un tout petit chiffre d’affaires. Du jour où je me suis formée à la dermopigmentation et que j’ai intégré la prestation dans ma carte de soins, j’ai fait décoller mon activité.

C’est le soin qui met en valeur tout le travail de l’esthéticienne, car il nécessite une vraie expertise. J’ai très vite  abandonné les soins qui n’apportaient pas de valeur ajoutée.

Vous précisez : «car il nécessite une véritable expertise». Encore faut-il se former de façon efficace. Et la dermopigmentation, tout comme son enseignement, n’est pas une profession réglementée…

C’est tout le drame de la dermopigmentation. C’est une prestation haut de gamme, qui nécessite de la dextérité, de l’expérience, un sens artistique, de la prudence, de la minutie et beaucoup de pratique. Tout cela ne s’improvise pas. Nous avions tenté de fédérer les professionnels pour faire reconnaitre le métier, mais ce n’est pas facile.

Mais c’est courant dans notre domaine. Songez qu’il y a trente ans, le métier d’esthéticienne n’existait pas sur le plan légal. La reconnaissance légale d’une profession n’est pas une panacée, mais elle permet au moins de fixer un cadre.

Au cours des vingt dernières années, j’ai pu constater le manque d’hygiène de certaines praticiennes et les conditions hasardeuses dans lesquelles elles exerçaient leur métier. Cette prise de conscience passe aussi par un enseignement rigoureux et encadré.

Quel conseil pourriez-vous donner à une esthéticienne entreprenante ?

Se lancer dans la dermopigmentation est une bonne solution. C’est même indispensable aujourd’hui. D’autant qu’il existe de nombreux débouchés, en particulier avec la pigmentation corrective, comme la reconstruction d’un mamelon après un cancer du sein, par exemple.

Mais je lui conseillerais aussi d’y aller progressivement. Il faut assurer chaque étape avant de passer à la suivante. Et prévoir des plans B. Parfois même des plans C ou D, en cas de problème. Rien n’est jamais acquis. C’est ce que la pandémie nous aura tous appris.

Propos recueillis par Siska von Saxenburg.

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