Spécialiste de la diffusion du parfum d’intérieur, la marque Scentys poursuit son avancée sur le marché des particuliers. Son directeur général, Pierre Loustric, explique à Profession bien-être comment la demande des consommateurs est en train de changer la donne depuis quelques mois.
Profession bien-être : Vous avez été les premiers à traiter le parfum d’intérieur comme une maison de parfums traditionnelle. Pourquoi ce choix ?
Pierre Loustric : Scentys a été créé en 2004, à l’époque où le parfum d’intérieur n’avait pas l’importance qu’il a aujourd’hui. Mais ce choix ne vient pas d’une simple intuition marketing. Notre fondateur, David Suissa, était ingénieur de formation. Passé par l’Ecole des Mines et Polytechnique, sa réflexion a été d’abord technologique : comment parvenir à diffuser des fragrances sans porter atteinte à la santé ? Donc, bien avant d’employer des parfumeurs et de faire appel à des nez pour créer nos collections olfactives, nous avons travaillé sur des diffuseurs originaux.
Le diffuseur est-il si important ?
Absolument. Le challenge était de créer un mode de diffusion qui ne dénaturerait pas la formule et qui ne ferait pas retomber de gouttelettes ou de résidus dans l’atmosphère. Notre premier métier est donc la diffusion, et c’est dans ce domaine que nous avons pu innover. En créant les parfums en capsule à diffusion sèche, nous avons pu mettre au point ce qui, à mon avis, correspond à une nouvelle façon de parfumer son environnement. Le parfum en capsule ne contient ni solvant ni alcool. Il se diffuse de façon silencieuse et surtout : il n’y a pas de rémanence dans les odeurs.
Ce qui veut dire, en clair, qu’on peut changer de fragrance rapidement dans une même pièce, sans que les odeurs ne se mélangent ?
Oui, et ce n’est pas le cas des nébulisateurs, des bougies parfumées ou des encens. Le diffuseur en capsule peut parfumer une pièce jusqu’à 35 m2. Chaque capsule dure 50 heures et peut se changer en fonction de l’ambiance désirée. Dans le cas d’une cabine de soins, par exemple, la praticienne peut changer de senteur à chaque traitement, selon qu’elle fait un soin relaxant ou tonique.
Pourquoi cet attrait croissant pour le parfum d’intérieur ?
Très clairement, la pandémie a changé la donne. Coincés chez eux, les consommateurs se sont trouvés face à l’anxiété du confinement. Les demandes des particuliers ont explosé à ce moment. Un phénomène nouveau pour nous. Jusque-là nous avions surtout travaillé pour des sociétés, des boutiques, des hôtels ou des entreprises qui demandaient des neutralisateurs d’odeurs ou des fragrances simples et agréables. Nous avions donc développé des systèmes nous permettant de parfumer de grandes surfaces.
Puis, est venu le temps où ces grandes entreprises ont voulu des empreintes olfactives personnalisées. Notre premier client sur ce sujet a été la joaillerie avec Tag Heuer, Vacheron Constantin et surtout Van Cleef & Arpels, qui a voulu parfumer toutes ses boutiques à travers le monde. Un exemple vite suivi par d’autres.
Vous estimez que le rapport au parfum a changé ?
Oui. Aujourd’hui, le consommateur recherche des odeurs saines, agréables, apaisantes. C’est vrai dans le domaine de la haute parfumerie : on constate un intérêt nouveau pour le naturel et des senteurs régressives, du style herbe coupée, senteur marine ou les confiseries de notre enfance.
Notre prochain sujet d’étude sera donc la domotique adaptée à l’atmosphère, afin de parfumer la maison en fonction des différentes heures de la journée et des activités que l’on y pratique, stimulant l’appétit dans la salle à manger ou apaisant dans la chambre à coucher. Et le tout sera connecté, tout comme on peut déjà programmer la température dans les différentes pièces d’une maison.
Voilà pour l’intimité. Mais à quoi sert de parfumer un espace de travail ?
Principalement à apaiser les tensions d’une équipe ou à faire diminuer l’anxiété générale due à la conjoncture.
On n’en est pas encore à créer des parfums pour stimuler la créativité ou la productivité ?
Je suis bien sûr que les experts du marketing sensoriel y ont déjà pensé. Mais pour le moment, nous n’avons pas encore eu de demandes. Et puis, à force d’être bombardés d’odeurs au bureau, les employés auraient peut-être peur d’être manipulés !
Propos recueillis par Siska von Saxenburg.