Le numéro un des clubs de remise en forme, à la tête d’un réseau de 400 salles, a fait de la formation de ses coachs un des piliers de sa stratégie de croissance. Les explications de Patrick Marquer, membre du comité de direction de L’Orange Bleue.
Profession bien-être : Est-ce que le secteur du fitness a du mal à trouver du personnel, comme tant d’autres secteurs ?
Patrick Marquer : Oui. Il avait déjà du mal à trouver du personnel avant la crise. Depuis, le phénomène s’est un peu amplifié. Pourquoi ? Parce qu’on est sur des emplois réglementés et que les flux de coachs sportifs, à un moment donné, n’étaient pas suffisants. Quand on est sur des secteurs à très forte croissance, forcément, la machine à former des coachs devrait marcher à plein. Or, le marché n’est pas assez irrigué en nombre de candidatures.
C’est une question de salaire ?
C’est plus compliqué que ça. Pour un coach, en entrée de carrière, on est sur du 1 800 euros bruts, mais on peut avoir des rémunérations plus élevées dans les grandes métropoles. J’ajoute qu’on a deux grands types de profils aujourd’hui : les collaborateurs salariés – chez nous, on est sur une base de deux coachs par club, donc 800 en France – et l’accompagnement individualisé en dehors des salles, où l’on est sur des statuts d’entreprenariat, avec un tout autre régime en termes de rémunération.
L’Orange Bleue a anticipé très tôt ces tensions sur le marché de l’emploi, en créant une école en 2009. Quel était le but ?
En fait, on avait anticipé une forte croissance du marché, alors que l’appareil de formation en France était sous-dimensionné. Par conséquent, on savait qu’on allait droit dans le mur. L’autre point, c’est que L’Orange Bleue a pris une direction en termes de ressources humaines assez atypique, puisqu’on s’est posé très vite la question de la polyvalence et du temps plein, là où certains collègues ont développé le temps partiel et la segmentation des horaires. Cela a donné naissance à notre modèle économique actuel.
En quoi consiste-t-il ?
Nous avons d’abord réfléchi aux missions qu’on proposait à nos collaborateurs, en essayant de voir comment un éducateur sportif, diplômé d’Etat, pouvait accompagner d’autres missions, de façon à pouvoir composer un temps plein. On était aussi convaincu que le levier de la formation était important pour fidéliser nos collaborateurs sur des métiers qui bougent. Certes, on forme des jeunes au diplôme d’Etat, puisqu’on est habilité par le ministère des Sports, mais on assure derrière une activité assez forte de formation continue et professionnelle.
Pourquoi avoir créé plusieurs écoles en France ?
En 2009, on était convaincus qu’on allait avoir de gros besoins et qu’on aurait une seule école en Bretagne et que les candidats viendraient à nous, puisqu’on leur garantissait en sortie, s’ils avaient leur diplôme, des CDI à temps plein. Force a été de constater que, si la promesse était belle, la mobilité n’était pas forcément là pour les candidats. On a donc décidé d’aller vers les bassins d’emplois. Aujourd’hui, on a un centre majeur qui se trouve à notre siège, à Rennes, une école sur Marseille, une autre sur Caen et un partenariat avec le CFA sport des Pays de la Loire.
Quel est le rapport avec votre modèle économique ?
Derrière la formation, on parie sur la fidélisation de notre clientèle. On est sur une activité où vous renouvelez votre base clients de plus de 50% tous les ans. Si vous parvenez à conserver vos adhérents actuels, vous aurez donc des coûts de captation de nouveaux adhérents beaucoup moins élevés. Et donc, vous aurez plus de moyens à allouer à vos ressources humaines. C’est pourquoi nous estimons que la fidélisation de notre clientèle est directement associée à nos coachs. C’est un investissement.
Vous formez uniquement pour L’Orange Bleue ?
On forme pour tout le monde. Les jeunes qui sortent de chez nous ont un diplôme d’Etat, c’est exactement le même que celui de tous les autres centres de formation. La différence, c’est qu’on a une proximité emploi/formation directe. Dès que le jeune a son diplôme, on peut lui proposer un emploi dans le réseau L’Orange Bleue, à condition qu’il soit mobile.
Quel bilan tirez-vous aujourd’hui de vos écoles ?
Très positif. On est en progression. Mais je pense que ce qui a été mis en place avec la réforme de l’apprentissage a fortement contribué à développer l’arrivée de jeunes dans nos métiers. Pendant très longtemps, un jeune qui voulait préparer un brevet professionnel de l’activité de la forme devait, soit être accompagné par Pôle emploi, soit financer seul sa formation. Les mesures sur l’apprentissage ont permis à ces jeunes de pouvoir entrer en formation et d’être financé, et, aux entreprises du secteur, d’en accueillir davantage.
Propos recueillis par Georges Margossian.