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Thierry Bordenave : « Les coiffeurs hommes ont l’avenir devant eux »

Thierry Bordenave

Fondateur de la franchise «Les hommes ont la classe» et des «gentlemen stores», mais aussi formateur et ambassadeur d’American Crew, Thierry Bordenave est devenu, en quelques années, un personnage incontournable de la coiffure masculine.

Profession bien-être : Qu’est-ce qui a changé dans la coiffure avec le retour des barbiers en France ?

Thierry Bordenave : Il y a huit ans, on a assisté à une révolution dans la coiffure homme, qui était le parent pauvre du secteur. Les «barbers hipsters» sont alors arrivés… Au même moment, il y a eu l’effet Chabal, ce joueur de rugby qui était une personnalité très populaire en France. Très vite, on s’est identifié à ces coiffeurs new-yorkais et anglais qui faisaient la barbe.

Le barbier est ainsi revenu sur le devant de la scène, mais avec deux catégories de coiffeurs : la première, massive, a décidé de rester dans le confort et ne s’est pas intéressée à cette tendance, en pensant que ce serait passager, tandis que les autres, minoritaires, ont eu envie, comme moi, d’évoluer dans leur métier. Et là, ça a été le début de la reconnaissance du métier de barbier.

Le début semblait prometteur, mais, depuis, les choses ont pris une tournure pas forcément heureuse, selon vous. Qu’est-ce qui s’est passé ?

Au début, tout le monde était passionné, c’est vrai, mais tout le monde a oublié aussi de penser à l’avenir et de faire payer le bon prix ! Donc, on a eu des coiffeurs qui ont continué à s’excuser d’être des coiffeurs et à appliquer des tarifs très bas…

Vous ne pensez pas que, quel que soit leur positionnement, les barbiers ont aussi contribué à changer le regard que les hommes portaient sur leur look ?

À mon avis, ils n’ont pas assez changé le marché. Il y avait beaucoup plus de barbiers au début. Les chiffres ont baissé considérablement. Quand vous avez un barbier qui prend 25 euros et qui se contente de vous raser rapidement à la tondeuse, le coup d’après, le client fait la même chose à la maison.

Barber, barbier… Quelle différence faites-vous ?

Le barber n’a pas de diplôme, il travaille dans un salon où il n’y a aucune expérience client. Comme la législation est mal faite, on peut ouvrir un salon en étant barber mais pas coiffeur. Il est censé ne faire que de la barbe, et donc pas de coiffure. La différence avec un coiffeur homme, c’est qu’il est très limité sur sa technique.

Le coiffeur homme, lui, a une vision beaucoup plus large. Il travaille plus sur la coupe que sur la barbe. Il est aussi à l’aise sur le long, alors que le barbier ne mise que sur le court, le rasé… C’est pour cette raison qu’il n’évoluera pas. Car la demande des hommes est différente et les barbers ne sont pas capables d’y répondre.

L’avenir des barbiers, c’est donc la coiffure homme ?

En effet, les coiffeurs hommes barbiers ont l’avenir devant eux. Il y a des coiffeurs qui l’ont compris, car ce phénomène a été une porte d’entrée vers le «barber store». Aujourd’hui, je pense que les barbers vont disparaître. Car les hommes reviennent vers les coupes longues, alors que les barbers ne savent faire que du court, que du rasage à la tondeuse.

Mais, pour cela, la coiffure homme doit se renouveler, dites-vous. Comment ?

L’homme a envie d’être sur des lieux où il y a une expérience client. Des lieux où il peut s’identifier. Chez nous, on a une expérience visuelle, olfactive, auditive et créative. C’est ce que j’appelle un «store». J’insiste sur le côté créatif, car j’ai mis en place des techniques bien particulières, des protocoles de soins spécifiques, que le client ne peut pas reproduire chez lui.

Pourquoi estimez-vous que cette prise de conscience est vitale pour la coiffure homme ?

On ne survit pas quand on fait ce que tout le monde fait. La coiffure dame a eu un moment où elle n’a pas su se réinventer. Elle a plafonné. Si on ne veut pas se retrouver dans la même situation, il faut prendre des risques, être visionnaire… Il faut s’inspirer de métiers qui évoluent très vite comme la restauration. Je regarde beaucoup ailleurs. C’est, pour moi, une source permanente d’inspiration.

Aujourd’hui, il y a eu trop de locations de fauteuil sauvages, trop de gens qui se sont installés à leur compte, 20 000 coiffeurs à domicile, c’est énorme ! Ce sont des coiffeurs qui font en plus payer moins cher qu’en salon de coiffure, alors que, normalement, il faut revoir à la hausse ses tarifs pour se développer.

Comment votre concept de « barber store » répond-il à ce défi ? 

L’avenir, c’était, pour moi, de créer des protocoles de soins pour les hommes, où le client est allongé comme dans un lit avec une serviette chaude sur les yeux, tout en jouant sur les sens olfactifs et auditifs, avec des huiles essentielles et de la musique. Du coup, cela nous a permis de développer d’autres services : soin du visage, massage du crâne et de la nuque, etc.

Aujourd’hui, quand on est dans le «store», les clients sont vraiment désinhibés, que ce soit les trentenaires, les quadras ou les quinquas. Je crois en des lieux extraordinaires, des lieux où l’expérience client doit être unique. Les salons qui ont compris qu’il fallait faire évoluer le concept, notamment à travers le soin pour l’homme et à travers l’expérience client, ceux-là vont arriver à durer.

Vous avez aussi géré un salon de coiffure mixte : estimez-vous que la coiffure homme est plus rentable?

On a su pérenniser et developper des salons qui atteignent, chacun, 400 000 euros de chiffre d’affaires, sans problème. Aujourd’hui, j’en ai trois en nom propre et huit en franchise «Les Hommes ont la classe». Pourquoi? Parce qu’on a éduqué nos collaborateurs et clients. Je pense que le client homme est de plus en plus compétent, de plus en plus exigeant. C’est pour ça que nous devons continuer à monter en compétences pour être capables de proposer ces services.

Et il n’est plus nécessaire de trouver l’emplacement numéro un et de payer un loyer élevé, comme avant. Il faut désormais aller chercher nos clients sur le digital. Il faut leur parler directement. Pour cela, il faut des équipes, mais aussi une vraie personnalité dans chaque salon. J’ai une coiffeuse à Rodez, qui travaille très bien. En quelques mois, elle a remonté son chiffre d’affaires de 20%…

Avec vous, le coiffeur doit être bon partout…

Pour faire de l’argent dans notre métier, il faut savoir réciter l’alphabet de A à Z ! Il faut être bon coiffeur, bon manager, bon communicant, créer de la surprise, etc. Par contre, il faut le climat pour ça. Ce qu’on a créé, ce sont des lieux qui soient assez grands, les hommes assez espacés, avec des événements. 

Dans l’un de mes stores, j’ai même lancé un café théâtre, avec environ 40 places assises. J’invite mes clients et, quand ils viennent, ils sont reconnaissants et vont consommer encore plus… Car l’homme est plus égoïste que la femme. Et quand il se sent bien dans un lieu, on a beaucoup plus de facilité à le faire consommer.

Propos recueillis par Georges Margossian.

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